coeurtendre Admin
Nombre de messages : 13248 Age : 67 Localisation : Trois-Rivières Réputation : 1 Date d'inscription : 16/02/2007
| Sujet: Lettre encycliques Laudato si/Pape François/20/ Mer 6 Oct 2021 - 1:26 | |
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Troisième chapitre La racine humaine de la crise écologique
101. Il ne sert à rien de décrire les symptômes de la crise écologique, si nous n’en reconnaissons pas la racine humaine. Il y a une manière de comprendre la vie et l’activité humaine qui a dévié et qui contredit la réalité jusqu’à lui nuire. Pourquoi ne pouvons-nous pas nous arrêter pour y penser ? Dans cette réflexion, je propose que nous nous concentrions sur le paradigme technocratique dominant ainsi que sur la place de l’être humain et de son action dans le monde.I. LA Technologique : Créativité et pouvoir 102. L’humanité est entrée dans une ère nouvelle où le pouvoir technologique nous met à la croisée des chemins. Nous sommes les héritiers de deux siècles d’énormes vagues de changement : la machine à vapeur, le chemin de fer, le télégraphe, l’électricité, l’automobile, l’avion, les industries chimiques, la médecine moderne, l’informatique, et, plus récemment, la révolution digitale, la robotique, les biotechnologies et les nanotechnologies. Il est juste de se réjouir face à ces progrès, et de s’enthousiasmer devant les grandes possibilités que nous ouvrent ces constantes nouveautés, parce que « la science et la technologie sont un produit merveilleux de la créativité humaine, ce don de Dieu ».[81] La modification de la nature à des fins utiles est une caractéristique de l’humanité depuis ses débuts, et ainsi la technique « exprime la tendance de l’esprit humain au dépassement progressif de certains conditionnements matériels ».[82] La technologie a porté remède à d’innombrables maux qui nuisaient à l’être humain et le limitaient. Nous ne pouvons pas ne pas valoriser ni apprécier le progrès technique, surtout dans la médecine, l’ingénierie et les communications. Et comment ne pas reconnaître tous les efforts de beaucoup de scientifiques et de techniciens qui ont apporté des alternatives pour un développement durable ?
103. La techno-science, bien orientée, non seulement peut produire des choses réellement précieuses pour améliorer la qualité de vie de l’être humain, depuis les objets usuels pour la maison jusqu’aux grands moyens de transports, ponts, édifices, lieux publics, mais encore est capable de produire du beau et de “projeter” dans le domaine de la beauté l’être humain immergé dans le monde matériel. Peut-on nier la beauté d’un avion, ou de certains gratte-ciels ? Il y a de belles œuvres picturales et musicales réalisées grâce à l’utilisation de nouveaux instruments techniques. Ainsi, dans la recherche de la beauté de la part de celui qui produit la technique, et en celui qui contemple cette beauté, se réalise un saut vers une certaine plénitude proprement humaine.
104. Mais nous ne pouvons pas ignorer que l’énergie nucléaire, la biotechnologie, l’informatique, la connaissance de notre propre ADN et d’autres capacités que nous avons acquises, nous donnent un terrible pouvoir. Mieux, elles donnent à ceux qui ont la connaissance, et surtout le pouvoir économique d’en faire usage, une emprise impressionnante sur l’ensemble de l’humanité et sur le monde entier. Jamais l’humanité n’a eu autant de pouvoir sur elle-même et rien ne garantit qu’elle s’en servira toujours bien, surtout si l’on considère la manière dont elle est en train de l’utiliser. Il suffit de se souvenir des bombes atomiques lancées en plein XXème siècle, comme du grand déploiement technologique étalé par le nazisme, par le communisme et par d’autres régimes totalitaires au service de l’extermination de millions de personnes, sans oublier, qu’aujourd’hui, la guerre possède des instruments toujours plus mortifères. En quelles mains se trouve et pourrait se trouver tant de pouvoir ? Il est terriblement risqué qu’il réside en une petite partie de l’humanité.
105. On a tendance à croire « que tout accroissement de puissance est en soi ‘progrès’, un degré plus haut de sécurité, d’utilité, de bien-être, de force vitale, de plénitude des valeurs »,[83] comme si la réalité, le bien et la vérité surgissaient spontanément du pouvoir technologique et économique lui-même. Le fait est que « l’homme moderne n’a pas reçu l’éducation nécessaire pour faire un bon usage de son pouvoir »,[84] parce que l’immense progrès technologique n’a pas été accompagné d’un développement de l’être humain en responsabilité, en valeurs, en conscience. Chaque époque tend à développer peu d’auto-conscience de ses propres limites. C’est pourquoi, il est possible qu’aujourd’hui l’humanité ne se rende pas compte de la gravité des défis qui se présentent, et « que la possibilité devienne sans cesse plus grande pour l’homme de mal utiliser sa puissance » quand « existent non pas des normes de liberté, mais de prétendues nécessités : l’utilité et la sécurité ».[85] L’être humain n’est pas pleinement autonome. Sa liberté est affectée quand elle se livre aux forces aveugles de l’inconscient, des nécessités immédiates, de l’égoïsme, de la violence. En ce sens, l’homme est nu, exposé à son propre pouvoir toujours grandissant, sans avoir les éléments pour le contrôler. Il peut disposer de mécanismes superficiels, mais nous pouvons affirmer qu’il lui manque aujourd’hui une éthique solide, une culture et une spiritualité qui le limitent réellement et le contiennent dans une abnégation lucide.
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