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 Lettre encycliques Laudato si/Pape François/22/

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coeurtendre
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Lettre encycliques Laudato si/Pape François/22/ Empty
MessageSujet: Lettre encycliques Laudato si/Pape François/22/   Lettre encycliques Laudato si/Pape François/22/ Icon_minitimeMer 6 Oct - 11:12

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III. Crise et conséquences de l'anthropocentrisme moderne

115. L’anthropocentrisme moderne, paradoxalement, a fini par mettre la raison technique au-dessus de la réalité, parce que l’être humain « n’a plus le sentiment ni que la nature soit une norme valable, ni qu’elle lui offre un refuge vivant. Il la voit sans suppositions préalables, objectivement, sous la forme d’un espace et d’une matière pour une œuvre où l’on jette tout, peu importe ce qui en résultera ».[92] De cette manière, la valeur que possède le monde en lui-même s’affaiblit. Mais si l’être humain ne redécouvre pas sa véritable place, il ne se comprend pas bien lui-même et finit par contredire sa propre réalité : « Non seulement la terre a été donnée par Dieu à l’homme, qui doit en faire usage dans le respect de l’intention primitive, bonne, dans laquelle elle a été donnée, mais l’homme, lui aussi, est donné par Dieu à lui-même et il doit donc respecter la structure naturelle et morale dont il a été doté».[93]

116. Dans la modernité, il y a eu une grande démesure anthropocentrique qui, sous d’autres formes, continue aujourd’hui à nuire à toute référence commune et à toute tentative pour renforcer les liens sociaux. C’est pourquoi, le moment est venu de prêter de nouveau attention à la réalité avec les limites qu’elle impose, et qui offrent à leur tour la possibilité d’un développement humain et social plus sain et plus fécond. Une présentation inadéquate de l’anthropologie chrétienne a pu conduire à soutenir une conception erronée de la relation entre l’être humain et le monde. Un rêve prométhéen de domination sur le monde s’est souvent transmis, qui a donné l’impression que la sauvegarde de la nature est pour les faibles. La façon correcte d’interpréter le concept d’être humain comme “seigneur” de l’univers est plutôt celle de le considérer comme administrateur responsable.[94]




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117. Le manque de préoccupation pour mesurer les préjudices causés à la nature et l’impact environnemental des décisions est seulement le reflet le plus visible d’un désintérêt pour reconnaître le message que la nature porte inscrit dans ses structures mêmes. Quand on ne reconnaît pas, dans la réalité même, la valeur d’un pauvre, d’un embryon humain, d’une personne vivant une situation de handicap – pour prendre seulement quelques exemples – on écoutera difficilement les cris de la nature elle-même. Tout est lié. Si l’être humain se déclare autonome par rapport à la réalité et qu’il se pose en dominateur absolu, la base même de son existence s’écroule, parce qu’« au lieu de remplir son rôle de collaborateur de Dieu dans l’œuvre de la création, l’homme se substitue à Dieu et ainsi finit par provoquer la révolte de la nature ».[95]

118. Cette situation nous conduit à une schizophrénie permanente, qui va de l’exaltation technocratique qui ne reconnaît pas aux autres êtres une valeur propre, à la réaction qui nie toute valeur particulière à l’être humain. Mais on ne peut pas faire abstraction de l’humanité. Il n’y aura pas de nouvelle relation avec la nature sans un être humain nouveau. Il n’y a pas d’écologie sans anthropologie adéquate. Quand la personne humaine est considérée seulement comme un être parmi d’autres, qui procéderait des jeux du hasard ou d’un déterminisme physique, « la conscience de sa responsabilité risque de s’atténuer dans les esprits ».[96] Un anthropocentrisme dévié ne doit pas nécessairement faire place à un “bio-centrisme”, parce que cela impliquerait d’introduire un nouveau déséquilibre qui, non seulement ne résoudrait pas les problèmes mais en ajouterait d’autres. On ne peut pas exiger de l’être humain un engagement respectueux envers le monde si on ne reconnaît pas et ne valorise pas en même temps ses capacités particulières de connaissance, de volonté, de liberté et de responsabilité.



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119. La critique de l’anthropocentrisme dévié ne devrait pas non plus faire passer au second plan la valeur des relations entre les personnes. Si la crise écologique est l’éclosion ou une manifestation extérieure de la crise éthique, culturelle et spirituelle de la modernité, nous ne pouvons pas prétendre soigner notre relation à la nature et à l’environnement sans assainir toutes les relations fondamentales de l’être humain. Quand la pensée chrétienne revendique une valeur particulière pour l’être humain supérieure à celle des autres créatures, cela donne lieu à une valorisation de chaque personne humaine, et entraîne la reconnaissance de l’autre. L’ouverture à un “ tu ” capable de connaître, d’aimer, et de dialoguer continue d’être la grande noblesse de la personne humaine. C’est pourquoi, pour une relation convenable avec le monde créé, il n’est pas nécessaire d’affaiblir la dimension sociale de l’être humain ni sa dimension transcendante, son ouverture au “ Tu ” divin. En effet, on ne peut pas envisager une relation avec l’environnement isolée de la relation avec les autres personnes et avec Dieu. Ce serait un individualisme romantique, déguisé en beauté écologique, et un enfermement asphyxiant dans l’immanence.



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120. Puisque tout est lié, la défense de la nature n’est pas compatible non plus avec la justification de l’avortement. Un chemin éducatif pour accueillir les personnes faibles de notre entourage, qui parfois dérangent et sont inopportunes, ne semble pas praticable si l’on ne protège pas l’embryon humain, même si sa venue cause de la gêne et des difficultés : « Si la sensibilité personnelle et sociale à l’accueil d’une nouvelle vie se perd, alors d’autres formes d’accueil utiles à la vie sociale se dessèchent ».[97]

121. Le développement d’une nouvelle synthèse qui dépasse les fausses dialectiques des derniers siècles reste en suspens. Le christianisme lui-même, en se maintenant fidèle à son identité et au trésor de vérité qu’il a reçu de Jésus-Christ, se repense toujours et se réexprime dans le dialogue avec les nouvelles situations historiques, laissant apparaître ainsi son éternelle nouveauté.[98]

Le relativisme pratique

122. Un anthropocentrisme dévié donne lieu à un style de vie dévié. Dans l’Exhortation apostolique Evangelii gaudium, j’ai fait référence au relativisme pratique qui caractérise notre époque, et qui est « encore plus dangereux que le relativisme doctrinal».[99] Quand l’être humain se met lui-même au centre, il finit par donner la priorité absolue à ses intérêts de circonstance, et tout le reste devient relatif. Par conséquent, il n’est pas étonnant que, avec l’omniprésence du paradigme technocratique et le culte du pouvoir humain sans limites, se développe chez les personnes ce relativisme dans lequel tout ce qui ne sert pas aux intérêts personnels immédiats est privé d’importance. Il y a en cela une logique qui permet de comprendre comment certaines attitudes, qui provoquent en même temps la dégradation de l’environnement et la dégradation sociale, s’alimentent mutuellement.

123. La culture du relativisme est la même pathologie qui pousse une personne à exploiter son prochain et à le traiter comme un pur objet, l’obligeant aux travaux forcés, ou en faisant de lui un esclave à cause d’une dette. C’est la même logique qui pousse à l’exploitation sexuelle des enfants ou à l’abandon des personnes âgées qui ne servent pas des intérêts personnels. C’est aussi la logique intérieure de celui qui dit : ‛Laissons les forces invisibles du marché réguler l’économie, parce que ses impacts sur la société et sur la nature sont des dommages inévitables’. S’il n’existe pas de vérités objectives ni de principes solides hors de la réalisation de projets personnels et de la satisfaction de nécessités immédiates, quelles limites peuvent alors avoir la traite des êtres humains, la criminalité organisée, le narcotrafic, le commerce de diamants ensanglantés et de peaux d’animaux en voie d’extinction ? N’est-ce pas la même logique relativiste qui justifie l’achat d’organes des pauvres dans le but de les vendre ou de les utiliser pour l’expérimentation, ou le rejet d’enfants parce qu’ils ne répondent pas au désir de leurs parents ? C’est la même logique du “utilise et jette”, qui engendre tant de résidus, seulement à cause du désir désordonné de consommer plus qu’il n’est réellement nécessaire. Par conséquent, nous ne pouvons pas penser que les projets politiques et la force de la loi seront suffisants pour que soient évités les comportements qui affectent l’environnement, car, lorsque la culture se corrompt et qu’on ne reconnaît plus aucune vérité objective ni de principes universellement valables, les lois sont comprises uniquement comme des impositions arbitraires et comme des obstacles à contourner.



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La nécessité de préserver le travail

124. Dans n’importe quelle approche d’une écologie intégrale qui n’exclue pas l’être humain, il est indispensable d’incorporer la valeur du travail, développée avec grande sagesse par saint Jean-Paul II dans son Encyclique Laborem exercens. Rappelons que, selon le récit biblique de la création, Dieu a placé l’être humain dans le jardin à peine créé (cf. Gn 2, 15) non seulement pour préserver ce qui existe (protéger) mais aussi pour le travailler de manière à ce qu’il porte du fruit (labourer). Ainsi, les ouvriers et les artisans « assurent une création éternelle » (Si 38, 34). En réalité, l’intervention humaine qui vise le développement prudent du créé est la forme la plus adéquate d’en prendre soin, parce qu’elle implique de se considérer comme instrument de Dieu pour aider à faire apparaître les potentialités qu’il a lui-même mises dans les choses : « Le Seigneur a créé les plantes médicinales, l’homme avisé ne les méprise pas » (Si 38, 4).

125. Si nous essayons de considérer quelles sont les relations adéquates de l’être humain avec le monde qui l’entoure, la nécessité d’une conception correcte du travail émerge, car si nous parlons de la relation de l’être humain avec les choses, la question du sens et de la finalité de l’action humaine sur la réalité apparaît. Nous ne parlons pas seulement du travail manuel ou du travail de la terre, mais de toute activité qui implique quelque transformation de ce qui existe, depuis l’élaboration d’une étude sociale jusqu’au projet de développement technologique. N’importe quelle forme de travail suppose une conception d’une relation que l’être humain peut ou doit établir avec son semblable. La spiritualité chrétienne, avec l’admiration contemplative des créatures que nous trouvons chez saint François d’Assise, a développé aussi une riche et saine compréhension du travail, comme nous pouvons le voir, par exemple, dans la vie du bienheureux Charles de Foucauld et de ses disciples.




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126. Recueillons aussi quelque chose de la longue tradition du monachisme. Au commencement, il favorisait, d’une certaine manière, la fuite du monde, essayant d’échapper à la décadence urbaine. Voilà pourquoi les moines cherchaient le désert, convaincus que c’était le lieu propice pour reconnaître la présence de Dieu. Plus tard, saint Benoît de Nurcie a proposé que ses moines vivent en communauté, alliant la prière et la lecture au travail manuel (“Ora et labora’’). Cette introduction du travail manuel, imprégné de sens spirituel, était révolutionnaire. On a appris à chercher la maturation et la sanctification dans la compénétration du recueillement et du travail. Cette manière de vivre le travail nous rend plus attentifs et plus respectueux de l’environnement, elle imprègne de saine sobriété notre relation au monde.

127. Nous disons que « l’homme est l’auteur, le centre et le but de toute la vie économico-sociale».[100] Malgré cela, quand la capacité de contempler et de respecter est détériorée chez l’être humain, les conditions sont créées pour que le sens du travail soit défiguré.[101] Il faut toujours se rappeler que l’être humain est « capable d’être lui-même l’agent responsable de son mieux-être matériel, de son progrès moral, et de son épanouissement spirituel».[102] Le travail devrait être le lieu de ce développement personnel multiple où plusieurs dimensions de la vie sont en jeu : la créativité, la projection vers l’avenir, le développement des capacités, la mise en pratique de valeurs, la communication avec les autres, une attitude d’adoration. C’est pourquoi, dans la réalité sociale mondiale actuelle, au-delà des intérêts limités des entreprises et d’une rationalité économique discutable, il est nécessaire que « l’on continue à se donner comme objectif prioritaire l’accès au travail...pour tous».[103]

128. Nous sommes appelés au travail dès notre création. On ne doit pas chercher à ce que le progrès technologique remplace de plus en plus le travail humain, car ainsi l’humanité se dégraderait elle-même. Le travail est une nécessité, il fait partie du sens de la vie sur cette terre, chemin de maturation, de développement humain et de réalisation personnelle. Dans ce sens, aider les pauvres avec de l’argent doit toujours être une solution provisoire pour affronter des urgences. Le grand objectif devrait toujours être de leur permettre d’avoir une vie digne par le travail. Mais l’orientation de l’économie a favorisé une sorte d’avancée technologique pour réduire les coûts de production par la diminution des postes de travail qui sont remplacés par des machines. C’est une illustration de plus de la façon dont l’action de l’être humain peut se retourner contre lui-même. La diminution des postes de travail « a aussi un impact négatif sur le plan économique à travers l’érosion progressive du “capital social”, c’est-à-dire de cet ensemble de relations de confiance, de fiabilité, de respect des règles indispensables à toute coexistence civile ».[104] En définitive, « les coûts humains sont toujours aussi des coûts économiques, et les dysfonctionnements économiques entraînent toujours des coûts humains ».[105] Cesser d’investir dans les personnes pour obtenir plus de profit immédiat est une très mauvaise affaire pour la société.




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129. Pour qu’il continue d’être possible de donner du travail, il est impérieux de promouvoir une économie qui favorise la diversité productive et la créativité entrepreneuriale. Par exemple, il y a une grande variété de systèmes alimentaires ruraux de petites dimensions qui continuent à alimenter la plus grande partie de la population mondiale, en utilisant une faible proportion du territoire et de l’eau, et en produisant peu de déchets, que ce soit sur de petites parcelles agricoles, vergers, ou grâce à la chasse, à la cueillette et la pêche artisanale, entre autres. Les économies d’échelle, spécialement dans le secteur agricole, finissent par forcer les petits agriculteurs à vendre leurs terres ou à abandonner leurs cultures traditionnelles. Les tentatives de certains pour développer d’autres formes de production plus diversifiées, finissent par être vaines en raison des difficultés pour entrer sur les marchés régionaux et globaux, ou parce que l’infrastructure de vente et de transport est au service des grandes entreprises. Les autorités ont le droit et la responsabilité de prendre des mesures de soutien clair et ferme aux petits producteurs et à la variété de la production. Pour qu’il y ait une liberté économique dont tous puissent effectivement bénéficier, il peut parfois être nécessaire de mettre des limites à ceux qui ont plus de moyens et de pouvoir financier. Une liberté économique seulement déclamée, tandis que les conditions réelles empêchent beaucoup de pouvoir y accéder concrètement et que l’accès au travail se détériore, devient un discours contradictoire qui déshonore la politique. L’activité d’entreprise, qui est une vocation noble orientée à produire de la richesse et à améliorer le monde pour tous, peut être une manière très féconde de promouvoir la région où elle installe ses projets ; surtout si on comprend que la création de postes de travail est une partie incontournable de son service du bien commun.



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L’innovation biologique à partir de la recherche

130. Dans la vision philosophique et théologique de la création que j’ai cherché à proposer, il reste clair que la personne humaine, avec la particularité de sa raison et de sa science, n’est pas un facteur extérieur qui doit être totalement exclu. Cependant, même si l’être humain peut intervenir sur le monde végétal et animal et en faire usage quand c’est nécessaire pour sa vie, le Catéchisme enseigne que les expérimentations sur les animaux sont légitimes seulement « si elles restent dans des limites raisonnables et contribuent à soigner ou sauver des vies humaines ».[106] Il rappelle avec fermeté que le pouvoir de l’homme a des limites et qu’« il est contraire à la dignité humaine de faire souffrir inutilement les animaux et de gaspiller leurs vies ».[107] Toute utilisation ou expérimentation « exige un respect religieux de l’intégrité de la création ».[108]

131. Je veux recueillir ici la position équilibrée de saint Jean-Paul II, mettant en évidence les bienfaits des progrès scientifiques et technologiques, qui « manifestent la noblesse de la vocation de l’homme à participer de manière responsable à l’action créatrice de Dieu dans le monde ». Mais en même temps il rappelait qu’« aucune intervention dans un domaine de l’écosystème ne peut se dispenser de prendre en considération ses conséquences dans d’autres domaines ».[109] Il soulignait que l’Église valorise l’apport de « l’étude et des applications de la biologie moléculaire, complétée par d’autres disciplines, comme la génétique et son application technologique dans l’agriculture et dans l’industrie »[110], même s’il affirme aussi que cela ne doit pas donner lieu à une « manipulation génétique menée sans discernement »[111] qui ignore les effets négatifs de ces interventions. Il n’est pas possible de freiner la créativité humaine. Si on ne peut interdire à un artiste de déployer sa capacité créatrice, on ne peut pas non plus inhiber ceux qui ont des dons spéciaux pour le développement scientifique et technologique, dont les capacités ont été données par Dieu pour le service des autres. En même temps, on ne peut pas cesser de préciser toujours davantage les objectifs, les effets, le contexte et les limites éthiques de cette activité humaine qui est une forme de pouvoir comportant de hauts risques.



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132. C’est dans ce cadre que devrait se situer toute réflexion autour de l’intervention humaine sur les végétaux et les animaux qui implique aujourd’hui des mutations génétiques générées par la biotechnologie, dans le but d’exploiter les possibilités présentes dans la réalité matérielle. Le respect de la foi envers la raison demande de prêter attention à ce que la science biologique elle-même, développée de manière indépendante par rapport aux intérêts économiques, peut enseigner sur les structures biologiques ainsi que sur leurs possibilités et leurs mutations. Quoiqu’il en soit, l’intervention légitime est celle qui agit sur la nature « pour l’aider à s’épanouir dans sa ligne, celle de la création, celle voulue par Dieu ».[112]

133. Il est difficile d’émettre un jugement général sur les développements de transgéniques (OMG), végétaux ou animaux, à des fins médicales ou agro-pastorales, puisqu’ils peuvent être très divers entre eux et nécessiter des considérations différentes. D’autre part, les risques ne sont pas toujours dus à la technique en soi, mais à son application inadaptée ou excessive. En réalité, les mutations génétiques ont été, et sont très souvent, produites par la nature elle-même. Même celles provoquées par l’intervention humaine ne sont pas un phénomène moderne. La domestication des animaux, le croisement des espèces et autres pratiques anciennes et universellement acceptées peuvent entrer dans ces considérations. Il faut rappeler que le début des développements scientifiques de céréales transgéniques a été l’observation d’une bactérie qui produit naturellement et spontanément une modification du génome d’un végétal. Mais dans la nature, ces processus ont un rythme lent qui n’est pas comparable à la rapidité qu’imposent les progrès technologiques actuels, même quand ces avancées font suite à un développement scientifique de plusieurs siècles.

134. Même en l’absence de preuves irréfutables du préjudice que pourraient causer les céréales transgéniques aux êtres humains, et même si, dans certaines régions, leur utilisation est à l’origine d’une croissance économique qui a aidé à résoudre des problèmes, il y a des difficultés importantes qui ne doivent pas être relativisées. En de nombreux endroits, suite à l’introduction de ces cultures, on constate une concentration des terres productives entre les mains d’un petit nombre, due à « la disparition progressive des petits producteurs, qui, en conséquence de la perte de terres exploitables, se sont vus obligés de se retirer de la production directe».[113] Les plus fragiles deviennent des travailleurs précaires, et beaucoup d’employés ruraux finissent par migrer dans de misérables implantations urbaines. L’extension de la surface de ces cultures détruit le réseau complexe des écosystèmes, diminue la diversité productive, et compromet le présent ainsi que l’avenir des économies régionales. Dans plusieurs pays, on perçoit une tendance au développement des oligopoles dans la production de grains et d’autres produits nécessaires à leur culture, et la dépendance s’aggrave encore avec la production de grains stériles qui finirait par obliger les paysans à en acheter aux entreprises productrices.

135. Sans doute, une attention constante, qui porte à considérer tous les aspects éthiques concernés, est nécessaire. Pour cela, il faut garantir une discussion scientifique et sociale qui soit responsable et large, capable de prendre en compte toute l’information disponible et d’appeler les choses par leur nom. Parfois, on ne met pas à disposition toute l’information, qui est sélectionnée selon les intérêts particuliers, qu’ils soient politiques, économiques ou idéologiques. De ce fait, il devient difficile d’avoir un jugement équilibré et prudent sur les diverses questions, en prenant en compte tous les paramètres pertinents. Il est nécessaire d’avoir des espaces de discussion où tous ceux qui, de quelque manière, pourraient être directement ou indirectement concernés (agriculteurs, consommateurs, autorités, scientifiques, producteurs de semences, populations voisines des champs traités, et autres) puissent exposer leurs problématiques ou accéder à l’information complète et fiable pour prendre des décisions en faveur du bien commun présent et futur. Il s’agit d’une question d’environnement complexe dont le traitement exige un regard intégral sous tous ses aspects, et cela requiert au moins un plus grand effort pour financer les diverses lignes de recherche, autonomes et interdisciplinaires, en mesure d’apporter une lumière nouvelle.

136. D’autre part, il est préoccupant que certains mouvements écologistes qui défendent l’intégrité de l’environnement et exigent avec raison certaines limites à la recherche scientifique, n’appliquent pas parfois ces mêmes principes à la vie humaine. En général, on justifie le dépassement de toutes les limites quand on fait des expérimentations sur les embryons humains vivants. On oublie que la valeur inaliénable de l’être humain va bien au-delà de son degré de développement. Du reste, quand la technique ignore les grands principes éthiques, elle finit par considérer comme légitime n’importe quelle pratique. Comme nous l’avons vu dans ce chapitre, la technique séparée de l’éthique sera difficilement capable d’autolimiter son propre pouvoir.
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