coeurtendre Admin
Nombre de messages : 13281 Age : 67 Localisation : Trois-Rivières Réputation : 1 Date d'inscription : 16/02/2007
| Sujet: Le Christ est-il donc divisé? Mar 21 Jan - 1:37 | |
| INTRODUCTION AU THÈME DE L’ANNÉE 2014 Le Christ est-il divisé? (cf. 1 Corinthiens 1,1-17) 1. Nous autres Canadiens, nous vivons dans un pays marqué par les diversités linguistiques, culturelles, et même climatiques, et nous représentons aussi toute une variété d’expressions de la foi chrétienne. Cette vie dans la différence, mais aussi dans la fidélité au désir du Christ que ses disciples soient unis, nous a conduits à réfléchir à la question provocatrice de Paul dans la première épître aux Corinthiens : « Le Christ est-il donc divisé? » Dans la foi, nous répondons : « Non ! », et cela bien que nos communautés ecclésiales soient encore scandaleusement déchirées. La première épître aux Corinthiens nous montre aussi comment valoriser et accueillir dès à présent les dons des autres, malgré nos divisions, et cela nous encourage à travailler pour l’unité.
2. Le Canada est renommé pour sa splendeur naturelle : ses montagnes, ses forêts, ses lacs et ses rivières, ses océans de blé et ses trois côtes maritimes. Notre pays s’étend de l’Atlantique au Pacifique et de la frontière des États-Unis au Pôle-Nord. C’est une terre riche au plan agricole et en ressources naturelles. Le Canada est marqué également par une diversité de populations : les Premières Nations, les Inuits et les Métis[2], et de nombreux peuples du monde entier venus s’y installer. Nous avons deux langues officielles, le français et l’anglais, bien que beaucoup de Canadiens soient attachés à l’héritage culturel et linguistique de leurs terres ancestrales. Nos disparités sociales et politiques reposent souvent sur des distinctions linguistiques, culturelles et régionales, bien que nous comprenions progressivement toute la contribution apportée par ces identités nationales à une saine diversité canadienne. Beaucoup de chrétiens ont enrichi ce milieu multiculturel par leurs spécificités de culte et de ministère. L’épître de Paul s’adresse à nous dans notre diversité, et nous invite à reconnaître qu’en tant qu’Église, dans les lieux particuliers où nous sommes implantés, nous ne devons ni nous isoler, ni agir à l’encontre les uns des autres, mais plutôt reconnaître nos liens étroits avec tous ceux qui invoquent le nom du Seigneur.
3. Dans le passage de l’Écriture choisi pour notre réflexion de cette année, Paul débute vigoureusement ses épîtres aux Corinthiens. Comme le ferait une ouverture d’opéra ou le mouvement d’entrée d’une symphonie, ce passage aborde des thèmes qui nous préparent sans aucun doute au contenu à suivre de ces lettres. Le texte comprend trois mouvements. Tous trois posent un fondement solide mais qui interpelle aussi nos réflexions de chrétiens, appelés à vivre et à travailler ensemble dans les Églises et la société d’aujourd’hui.
4. Dans le premier mouvement (1,1-3), Paul, avec son compagnon chrétien Sosthène – qui forment une minuscule mais authentique communauté de deux membres – s’adresse à une communauté plus importante et profondément active, celle des chrétiens de Corinthe. Il qualifie les Corinthiens d’« Église de Dieu », et pas seulement par conséquent de branche locale mais de pleine expression de l’Église en cette région du monde. Paul leur rappelle qu’ils constituent un peuple d’ « appelés » : « appelés à être saints », non pas de façon isolée et individuelle, mais « avec tous ceux qui invoquent en tout lieu le nom de notre Seigneur Jésus Christ, leur Seigneur et le nôtre ». Cette expression pourrait se traduire également ainsi : « aussi bien là où ils se trouvent que là où nous sommes ». Ils sont donc authentiquement l’Église de Dieu, mais en lien étroit avec tous ceux qui invoquent le Seigneur, aussi bien en Le confessant que là où ils se trouvent. Ensuite, comme en toutes ses lettres, Paul développe ses souhaits habituels et vigoureux de grâce et de paix, de la part de Dieu. Dans le langage de Paul, le mot « grâce » renvoie à la bonté de Dieu et aux dons qu’il nous a faits dans le Christ, et ce mot doit nous amener à la reconnaissance envers Dieu et à la générosité les uns envers les autres. La « paix » qui nous est destinée en toute plénitude et réciprocité est communion (koinonia) en Dieu.
5. Où la grâce et la paix de Dieu vous apparaissent-elles présentes dans votre Église locale, votre communauté au sens large, et votre pays? Comment pouvez-vous dépasser le souci de votre communauté immédiate pour vous rendre attentifs à la communauté chrétienne et au monde dans leur ensemble?
6. C’est lorsqu’il est sur le point d’appeler la communauté de Corinthe à la tâche, que Paul entame le second mouvement de notre texte (1,4-9) dans lequel il exprime sa reconnaissance pour « la grâce de Dieu qui a été donnée » aux Corinthiens « dans le Christ Jésus ». Il ne s’agit pas ici d’une simple formalité mais d’une joie authentique pour les dons que Dieu a accordés à cette communauté. Paul continue de les affermir : « Car vous avez été, en lui, comblés de toutes les richesses (...), si bien qu’il ne vous manque aucun don de la grâce ». Les Corinthiens ont l’assurance d’être fortifiés jusqu’au bout, et que Dieu « est fidèle ». Il nous appelle à la communion (koinonia) avec son Fils, et à tout ce que cela implique socialement et spirituellement pour nos Églises et nos peuples.
7. En tant que chrétiens canadiens, nous devons bien reconnaître que nous n’avons pas toujours été prêts à nous réjouir de la présence des dons de Dieu en d’autres communautés chrétiennes. La lecture du texte de Paul dans un esprit œcuménique, nous fait mieux prendre conscience que nous sommes invités à nous réjouir sincèrement de la bénédiction accordée par Dieu à d’autres chrétiens et à d’autres peuples. Ceux qui, en premier, ont apporté la foi chrétienne au Canada ont souvent dédaigné les dons et intuitions des populations indigènes, et n’ont pas suffisamment perçu les bénédictions que Dieu accordait à travers eux.
Nous avons bien des motifs d’action de grâce pour la diversité de populations et d’expressions de la foi en notre pays. Bien qu’il y ait, dans notre histoire, beaucoup d’exemples de manques de respect mutuel et de soutien insuffisant les uns des autres, nous savons que notre nation s’est construite sur la collaboration et la recherche de la paix, aussi bien chez nous que dans le monde. Nous avons trop souvent tendance à considérer qu’il est normal de bénéficier des bienfaits de la nature et des dons de Dieu, et nous avons du mal à maintenir l’équilibre entre la prospérité et notre responsabilité à l’égard de ces biens matériels. Nous nous battons aussi pour que soient mises en œuvre les valeurs auxquelles nous tenons, en tant que Canadiens. Comme chrétiens et comme Églises, nous nous sentons appelés à recevoir avec gratitude les dons que Dieu a placés chez les autres, et à manifester concrètement de la reconnaissance et à prendre soin de l’ensemble de notre pays et du monde.
8. Quels sont les motifs d’action de grâce de votre Église, de votre communauté et de votre pays? Comment avez-vous fait l’expérience des dons spirituels et/ou matériels de Dieu existant chez d’autres chrétiens ou d’autres membres de votre propre communauté?
9. Dans le troisième mouvement (1,10-17), Paul s’adresse aux Corinthiens avec dureté, en leur reprochant la façon dont ils ont déformé l’Évangile et détruit l’unité de la communauté : « Moi, j’appartiens à Paul. Moi, à Apollos. Moi, à Céphas ». Paul n’applaudit pas même ceux qui ont proclamé le Christ comme leur chef, parce qu’ils ont utilisé le nom du Christ pour s’éloigner d’autres membres de la communauté chrétienne. L’invocation du nom du Christ ne doit pas nous servir à bâtir des murailles autour de nous, car son nom crée la fraternité et l’unité, et non les divisions. « Le Christ est-il divisé? » Paul ne voit pas d’inconvénient à ce que des communautés se constituent autour de responsables forts, mais c’est dans le Christ que la communauté doit trouver son identité fondamentale : « Est-ce Paul qui a été crucifié pour vous? Est-ce au nom de Paul que vous avez été baptisés? » Les gens de Chloé ont vu ce genre de choses se produire chez eux, et les ont tirées au clair.
10. C’est dans cet état de division que Paul appelle à se rassembler, et à être « bien unis dans un même esprit et dans une même pensée ». Il exhorte ses lecteurs et les Corinthiens à être « tous d’accord ». Paul voudrait-il dire que tout le monde doit célébrer et agir de la même manière ? Nous ne le pensons pas. Ces versets ne sont pas un appel à mettre de côté la responsabilité de Paul, d’Apollos ou de Céphas. Notre enracinement dans le Christ nous appelle à rendre grâces pour les dons de Dieu apportés à la mission commune de l’Église par ceux qui ne sont pas membres de notre groupe. Reconnaître les dons de Dieu chez les autres nous rapproche dans la foi et la mission, et nous conduit vers l’unité pour laquelle le Christ a prié, dans le respect d’une véritable diversité de culte et de vie.
11. Paul souligne deux éléments essentiels de la condition de disciple chrétien qui nous rendent fondamentalement unis au Christ : le baptême et la croix du Christ. Ce n’est pas au nom de Paul que nous avons été baptisés et ce n’est pas lui qui a été crucifié pour nous; c’est dans le Christ qu’est notre unité, et c’est de Lui que nous tenons la vie et le salut. Il n’en est pas moins vrai que nous appartenons à tel ou tel groupe particulier, et que nos Églises locales nous nourrissent dans la foi et nous aident à cheminer en disciples de Jésus. Ce qui en découle, pour Paul comme pour nous, n’est pas simplement le fait de nous sentir membre d’une Église particulière. Il s’agit plutôt pour nous de proclamer la Bonne Nouvelle, l’Évangile auquel nous avons répondu avec foi et dans la joie. Il nous faut à présent partager ce message au monde. La conclusion de Paul nous incite à nous demander si nous sommes porteurs de bonnes nouvelles en Christ les uns pour les autres, ou bien si nous transmettons la division, y compris au nom du Christ, ce qui − pour reprendre les mots de Paul − réduit à néant la croix du Christ.
12. Notre histoire, à nous chrétiens canadiens, est marquée par la collaboration et le soutien mutuel. Elle comporte des exemples d’efforts communs, de ministères partagés et même d’union entre plusieurs Églises. Là où une véritable unité entre Églises n’a pas été possible, nous avons souvent procédé à des accords mutuels et partagé des ministères qui témoignent de notre unité grandissante dans le Christ. Nos Églises ont mené des actions communes dans des domaines en rapport avec la pauvreté et la justice sociale, et bon nombre de nos Églises commencent à reconnaître ensemble nos responsabilités dans la manière infidèle au Christ dont nous avons traité les populations indigènes de notre pays. Et pourtant, en dépit de ces évolutions encourageantes vers l’unité que le Christ veut pour nous, nous continuons d’être divisés et désunis d’une manière qui déforme notre proclamation de l’Évangile.
13. Nous entendons également parler des gens de Chloé. C’est au moment où Chloé est en responsabilité que ce groupe constate et désigne les conflits et divisions de l’Église de Corinthe. Nous continuons d’avoir besoin de témoins semblables, de femmes et d’hommes de toutes nos Églises, et de leur ministère de réconciliation et d’unité. C’est en donnant la parole à des témoins de ce genre que nous comprendrons mieux ce que Paul entend par une communauté ayant « un même esprit et une même pensée » dans le Christ.
14. Comment comptez-vous faire, vous et votre Église, pour discerner que vous avez le même esprit et la même pensée dans le Christ que les autres Églises? En ce qui concerne les compréhensions différentes de la liturgie qui existent dans les Églises de votre ville ou de votre pays, comment votre intérêt pour ces autres pratiques cultuelles peut-il porter du fruit dans les efforts en faveur de l’unité chrétienne visible? Quelle mission commune entendez-vous partager avec les autres chrétiens pour aider le monde à faire une meilleure place aux autres?
15. Pour conclure, si nous considérons tous les dons et bénédictions que Dieu a manifestés en notre pays et chez nos peuples, nous sommes amenés à reconnaître que nous devons nous traiter les uns les autres, et même la terre dont nous tenons la vie, avec dignité et respect. Cette démarche de reconnaissance nous a conduits à la confession de notre péché et au repentir, ainsi qu’à la recherche de modes de vie nouveaux et durables sur terre. Elle nous a fait prendre mieux conscience que la bénédiction de Dieu s’étend à nous tous, et qu’aucun groupe de notre pays ne peut décider de l’utilisation des ressources nationales sans avoir entendu et tenu compte des avis de nos concitoyens canadiens. | |
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