Grâce à Internet, j’ai pu...
Grâce à Internet, j’ai pu performer ma mémoire en passant par le chemin de l'écriture, et pourtant je m'étais promis de ne jamais me servir d'internet parce que j'étais un grand passionné pour la communication de personne à personne, sans avoir à me servir d'une souris, d'un clavier et d'une tour ; mais un jour la vie m'a joué un très mauvais tour. J'avais une bibliothèque de livres à mon service, je détestais la télévision, j'étais à l'écoute des personnes en difficulté le jour comme la nuit.
J'ai du plaisir à le réécrire, j'étais un grand passionné pour la communication de personne à personne ; en quelques secondes, quel que soit l'endroit où je passais, je me faisais en peu de temps un ami d'un étranger. Au tout début, quand nous allions faire nos courses dans les supermarchés d’alimentation, mon épouse me voyait de loin parler avec l'un comme avec l'autre, puis ouvrir les portes de leur auto ; elle me disait : Tu les connais depuis longtemps, ces personnes? Ma réponse était : Non, je ne les connais pas du tout, c'est la première fois que je les rencontre, aujourd'hui.Au tout début, elle pensait que je la blaguais, mais avec les années elle s'est aperçu que partout où je passais, quel que soit le nom de l'endroit, j'entrais toujours en contact avec un(e) étranger(ère) ou avec une famille.
Mais malheureusement, de jour en jour je suis devenu allergique à l'odeur des vieux livres, ensuite je suis devenu allergique à l'odeur des livres neufs et des journaux, etc. Aujourd'hui je suis allergique à la pollution de plusieurs villes au Canada, j'ai perdu en grande partie le meilleur de mes contacts de personne à personne. Je me souviendrai toujours de ce jour où un de mes amis prêtre avait offert de me payer des cours d'informatique. Je lui ai répondu : Avant que je me serve d'internet, j'ai le temps de me faire interner. Toi, ta passion c'est l'informatique ; moi, ma passion c'est la communication de personne à personne. Pas pour rien que je suis allergique à la télévision, comme je le suis et que je le serai toujours à internet.
Un jour je me retrouve devant un homme de 82 ans qui avait souffert de la mort de son épouse décédée d'un cancer. Cet homme s'ennuyait, et très souvent il me disait son désir de voir son fils unique qui demeurait dans un pays lointain. Quand je suis allé voir un de mes amis à Québec, il était déjà en contact sur messenger avec un des membres de sa famille qui travaillait en Afrique. Vous comprendrez que tout de suite j'ai pensé à la perspective de permettre à cet homme de 82 ans de voir son fils en passant par messenger. C'est à partir de cette expérience que je me suis retrouvé sur internet malgré moi.
Entre temps, je me suis aperçu que je pouvais retrouver sur internet la possibilité de m'instruire à partir des sites correspondant aux multiples sujets qui m'intéressaient, pour remplacer mon impossibilité de lire à cause de mon asthme et de mon hyper-sensibilité à plusieurs allergènes que l'on retrouve dans l'environnement. Dans les années qui ont suivi, je me suis aperçu qu'il m'était possible de transformer mon écoute attentive de personne à personne en passant par le chemin de l'écriture, malgré l'immensité de la différence entre lire le texte d'une personne qui souffre et me retrouver dans un face-à-face pour voir et entendre chaque personne qui souffre.
La différence n'est pas comparable, c'est le jour et la nuit. Mais comme j'étais toute écoute devant chaque personne, il est certain que ma façon de lire la souffrance en passant par le chemin de l'écriture n'allait pas être la même que celle d'une personne qui n'a jamais vécu l'expérience de l'écoute sur le terrain de la vie au quotidien.
Je suis certain aujourd'hui que ce prêtre qui est décédé depuis proche 19 ans, celui qui a voulu me payer des cours d'informatique, doit avoir du plaisir à me voir faire de la relation d'aide en passant par le chemin de l'écriture. Lire la souffrance des uns et des autres sans même les voir, surtout après avoir vécu 30 années à écouter sur le terrain de la vie, cette lecture me fait grandir même si, le plus souvent, je n'ai pas l'occasion de voir les personnes qui passent par le chemin de l'écriture pour m'ouvrir la porte de leur coeur, très souvent en prenant un pseudonyme pour conserver l’anonymat de leurs confidences.
Mais encore aujourd'hui, même après tant d'années, je n'aime pas plus internet qu'au moment où le prêtre m'a proposé de suivre des cours d'informatique. Je ne navigue pas sur le Web par plaisir, mais seulement pour être une source pour ceux et celles qui ont besoin de confier leur souffrance à quelqu'un, qui va se servir des ses yeux de la même façon qu'il est possible de se servir de ses oreilles quand nous sommes des passionnés pour l'écoute dans un face-à-face, comme je l'ai vécu pendant mes trente ans d'écoute active sur le terrain de la vie. J'aime beaucoup cette expression qui dit : Écrire sa souffrance, c'est déjà un pas sur le chemin de la guérison.
Oui, je me souviens qu'un jour, grâce à Internet, il m'a été possible de sauver la vie d'un homme qui avait perdu ses deux filles dans un accident, parce qu'il leur avait prêté son auto. Le pauvre homme se sentait tellement responsable de leur mort qu'il voulait se suicider. Il cherchait sur le Web parmi les adresses messenger, une personne à qui confier sa souffrance. Dieu merci, il m'était arrivé très souvent de mettre ma vie en danger sur le terrain pour sauver des personnes (in extremis), dans des situations où tout est imprévu, on n'a pas le temps de penser, on agit sur le coup des émotions, parce que l'on est conscient en quelques secondes qu'il y a une vie à sauver.
Concernant cet homme, comme il avait un pseudonyme qui inspirait la crainte, je me suis dit intérieurement : Je suis sur le Web et non dans un face-à-face, alors je vais lui parler au cas où ce serait une personne qui a besoin d'aide. Comme je débutais sur messenger, cela faisait la deuxième personne qui me contactait par ce moyen. Comme j'avais le pseudonyme de coeurtendre, il était difficile de savoir si j'étais une femme ou un homme. Mon premier pseudonyme était Édouard, et personne ne m'appelait. En choisissant le pseudonyme de coeurtendre, je voulais démontrer par mon pseudo que j'étais contre toute forme de violence car je me rendais bien compte qu'il y avait beaucoup trop de violence dans l'écriture des internautes.
Cet homme avec qui j'ai eu un contact par l'écriture pendant presque une heure sur mon messenger, m'a remercié de lui avoir sauvé la vie. Il avait vraiment l'intention de passer à l'acte suicidaire. Cela faisait une semaine que ses filles étaient décédées, et deux semaines qu'il cherchait une personne à qui il pourrait confier son lourd fardeau. Il m'a expliqué qu'il ne cherchait pas à faire le choix entre un homme ou une femme avec qui communiquer, mais il voulait une personne qui saurait l'écouter avec beaucoup d'attention pour lui venir en aide. Cette première expérience à sauver une vie en passant par le chemin de l'écriture, m'a permis de comprendre que l’hyper sensibilité du coeur pouvait aussi bien rendre service par l'écriture que dans un face-à-face sur le terrain de la vie.
Mais avec toute l'expérience que j'ai acquise au fil des années, je sais qu'elles sont extrêmement rares les personnes qui écoutent en passant par le chemin de l'écriture. En écrivant ce fait vécu, j'espère de tout coeur toucher quelques-uns(es) d'entre vous, surtout si vous êtes des personnes ayant une expérience en relation d'aide sur le terrain de la vie. Ne l'oublions jamais, d'année en année nous manquons un peu de tout sur le terrain de la vie, dans toutes les professions, alors beaucoup de personnes en détresse se tournent vers une écoute virtuelle parce que l'écoute de terrain se fait de plus en plus rare. Que ce soit dans les Centres Hospitaliers, dans les Clsc ou les écoles, nous vivons dans une société où la frénésie des nouvelles technologies est en train de nous faire perdre le vrai sens de l'écoute.
Je n'aurais jamais pensé un jour qu'il m'aurait été possible d'écrire : Grâce à Internet, j’ai pu...
((( Sauver une vie ...)))