coeurtendre Admin
Nombre de messages : 13248 Age : 67 Localisation : Trois-Rivières Réputation : 1 Date d'inscription : 16/02/2007
| Sujet: Citation 19/ Saint-Jean-Paul ll/sujet/La Croix Lun 7 Oct - 3:18 | |
| aussi — et d'une manière organique — la Dans cette parabole, le Christ a voulu répondre à la question: « Qui est mon prochain? ». En effet, des trois passants sur la route de Jérusalem à Jéricho, au bord de laquelle un homme dévalisé et blessé par des brigands gisait à terre à moitié mort, c'est précisément le Samaritain qui se montra en vérité être le «prochain » de ce malheureux: le « prochain » veut dire également celui qui a accompli le commandement de l'amour du prochain. Deux autres voyageurs parcoururent la même route; l'un était prêtre et l'autre lévite; mais chacun d'eux, « le vit et passa outre ». Par contre, le Samaritain « le vit et fut pris de pitié. Il s'approcha, banda ses plaies », puis « le mena à l'hôtellerie et prit soin de lui ». Et, au moment de son départ, il recommanda soigneusement à l'hôtelier l'homme qui souffrait et s'engagea à solder les dépenses nécessaires.La parabole du bon Samaritain appartient à l'Évangile de la souffrance. Elle indique, en effet, quelle doit être la relation de chacun d'entre nous avec le prochain en état de souffrance. Il nous est interdit de « passer outre », avec indifférence, mais nous devons « nous arrêter » auprès de lui. Le bon Samaritain, c'est toute personne qui s'arrête auprès de la souffrance d'un autre homme, quelle qu'elle soit. S'arrêter ainsi, cela n'est pas faire preuve de curiosité mais de disponibilité. Celle-ci est comme une certaine disposition intérieure du coeur qui s'ouvre et qui est capable d'émotion. Le bon Samaritain est toute personne sensible à la souffrance d'autrui, la personne qui « s'émeut » du malheur de son prochain. Si le Christ, sachant ce qu'il y a dans l'homme, souligne cette capacité émotive, c'est qu'il veut en montrer l'importance dans nos comportements face à la souffrance des autres. Il importe donc de développer en soi cette sensibilité du coeur, qui témoigne de notre compassion pour un être souffrant. Parfois, cette compassion est la seule ou la principale expression possible de notre amour et de notre solidarité avec ceux qui souffrent. Mais le Bon Samaritain de la parabole du Christ ne se contente pas seulement d'émotion et de compassion. Ces mouvements affectifs deviennent pour lui un stimulant qui l'amène à agir concrètement et à porter secours à l'homme blessé. Tout homme qui porte secours à des souffrances, de quelque nature qu'elles soient, est donc un Bon Samaritain. Secours efficace, si possible. Ce faisant, il y met tout son coeur, mais il n'épargne pas non plus les moyens d'ordre matériel. On peut même dire qu'il se donne lui-même, qu'il donne son propre « moi » en ouvrant ce « moi » à un autre. Nous touchons ici un des points clés de toute l'anthropologie chrétienne. La personne humaine ne peut « pleinement se reconnaître que par le don désintéressé d'elle-même ». Un bon Samaritain, c'est justement l'homme capable d'un tel don de soi.En suivant la parabole évangélique, on pourrait dire que la souffrance, présentant des visages si divers à travers le monde humain, s'y trouve également pour libérer dans 1'homme ses capacités d'aimer, très précisément ce don désintéressé du propre « moi » au profit d'autrui, de ceux qui souffrent. Le monde de la souffrance humaine ne cesse d'appeler, pour ainsi dire, un monde autre: celui de l'amour humain; et cet amour désintéressé, qui s'éveille dans le cœur de l'homme et se manifeste dans ses actions, il le doit en un certain sens à la souffrance. L'homme qui est le « prochain » ne peut passer avec indifférence devant la souffrance des autres, au nom de la loi fondamentale de la solidarité humaine; il le peut encore moins au nom de la loi d'amour du prochain. Il doit « s'arrêter », « avoir pitié », comme le fit le Samaritain de la parabole évangélique. La parabole en elle-même exprime une vérité profondément chrétienne, mais en même temps une vérité humaine on ne peut plus universelle. Ce n'est pas sans raison que, même dans le langage courant, on appelle oeuvre « de bon samaritain » toute activité en faveur des personnes qui souffrent et ont besoin d'aide.Cette activité a revêtu, au cours des siècles, des formes institutionnelles organisées et dans son champ d'application elle a suscité les professions correspondantes. Combien la profession du médecin, celle de l'infirmière ou d'autres semblables sont des activités « de bon samaritain »! Etant donné l'inspiration « évangélique » qui les anime, nous sommes enclins à penser dans ces cas plus à une vocation qu'à une simple profession. Et les institutions qui, au cours des générations, ont accompli un service de « samaritain » se sont encore davantage développées et spécialisées en notre temps. Cela prouve sans aucun doute que l'homme d'aujourd'hui s'arrête avec toujours plus d'attention et de perspicacité aux souffrances de son prochain, cherche à les comprendre et à les prévenir avec toujours plus d'application. En ce domaine, l'homme possède également une capacité et une spécialisation croissantes. En songeant à tout cela, on peut dire que la parabole du Samaritain de l'Évangile est devenue un des éléments essentiels de la culture morale et de la civilisation universellement humaine. En pensant aussi à tous les hommes qui, par leur science et leurs capacités, rendent de multiples services au prochain qui souffre, on ne peut se dispenser de leur adresser des paroles de profonde reconnaissance.Ces paroles s'étendent à tous ceux qui se dévouent avec désintéressement au service du prochain qui souffre, en s'engageant de leur propre gré dans des activités secourables « de bon samaritain » et en leur consacrant tout le temps et toutes les forces dont ils disposent en dehors de leur travail professionnel. Cette activité spontanée « de bon samaritain » ou caritative peut être appelée activité sociale; elle peut aussi être définie comme un apostolat toutes les fois qu'elle est entreprise pour des motifs clairement évangéliques, surtout lorsque cela se produit en lien avec l'Église ou avec une autre Communauté chrétienne. L'activité volontaire « de bon samaritain » se réalise dans les milieux adaptés ou à travers des organisations créées à cet effet. Cette forme d'action a beaucoup d'importance, surtout s'il s'agit d'assumer de plus grandes tâches qui exigent la coopération et l'utilisation de moyens techniques. Mais l'action individuelle est non moins précieuse, spécialement de la part des personnes plus aptes à s'occuper de diverses sortes de souffrances qui demandent précisément une aide individuelle, personnelle. Quant à l'aide familiale, elle désigne soit les actes d'amour du prochain accomplis au bénéfice des membres de la même famille, soit l'entraide entre les familles.Il est difficile d'énumérer ici tous les genres et toutes les sphères d'activité « de bon samaritain » qui existent dans l'Église comme dans la société. Il faut du moins reconnaître qu'ils sont très nombreux; et on doit s'en réjouir, car grâce à eux, les valeurs morales fondamentales, telles que la valeur de la solidarité humaine, la valeur de l'amour chrétien du prochain, forment le cadre de la vie sociale et des rapports humains et endiguent à ce plan les formes variées de la haine, de la violence, de la cruauté, du mépris de l'homme, ou bien de la simple « insensibilité », autrement dit de l'indifférence vis-à-vis du prochain et de ses souffrances.Ici, on doit souligner l'importance considérable des attitudes qu'il convient d'adopter en éducation. La famille, l'école et les autres institutions de formation — ne serait-ce que pour des raisons humanitaires — doivent oeuvrer avec persévérance à l'éveil et à l'affinement de cette sensibilité envers le prochain et sa souffrance, dont la figure du bon Samaritain de l'Évangile est devenue le symbole. Évidemment, l'Église doit faire de même, et si possible approfondir davantage encore les motivations données par le Christ dans sa parabole et dans tout l'Évangile. L'éloquence de la parabole du bon Samaritain et de l'Évangile entier se résume avant tout à ceci: l'homme doit se sentir comme appelé à titre vraiment personnel à être le témoin de l'amour dans la souffrance. Les institutions sont très importantes et indispensables; cependant aucune institution ne peut par elle-même remplacer le coeur humain, la compassion humaine, l'amour humain, l'initiative humaine, lorsqu'il s'agit d'aller à la rencontre de la souffrance d'autrui. Ceci vaut pour les souffrances physiques, mais plus encore pour les nombreuses souffrances morales, et par-dessus tout lorsqu'il s'agit de la souffrance de l'âme. La parabole du bon Samaritain, qui — on l'a dit — appartient à l'Évangile de la souffrance, se retrouve avec lui tout au long de l'histoire de l'Eglise et du christianisme, tout au long de l'histoire de l'homme et de l'humanité. Elle témoigne que la révélation par le Christ du sens salvifique de la souffrance ne s'identifie nullement à une attitude de passivité. C'est tout le contraire. L'Évangile est la négation de la passivité en face de la souffrance. Le Christ lui-même, en ce domaine, est essentiellement actif. Et ainsi il réalise le programme messianique de sa mission conformément aux paroles du prophète: « L'Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu'il m'a consacré par l'onction, pour porter la bonne nouvelle aux pauvres. Il m'a envoyé annoncer aux captifs la délivrance et aux aveugles le retour à la vue, renvoyer en liberté les opprimés, proclamer une année de grâce du Seigneur ». Le Christ accomplit de manière surabondante ce programme messianique de sa mission: il passe « en faisant le bien », et le bien résultant de ses œuvres a pris du relief surtout au plan de la souffrance humaine. La parabole du bon Samaritain est en harmonie profonde avec le comportement du Christ lui-même.Cette parabole entrera, enfin, quant à son contenu essentiel, dans le discours bouleversant du jugement dernier, rapporté par Matthieu dans son Évangile: « Venez les bénis de mon Père, recevez en héritage le Royaume qui vous a été préparé depuis la fondation du monde. Car j'ai eu faim et vous m'avez donné à manger, j'ai eu soif et vous m'avez donné à boire, j'étais un étranger et vous m'avez accueilli, nu et vous m'avez vêtu, malade et vous m'avez visité, prisonnier et vous êtes venu me voir ». Aux justes qui demandent quand il leur est arrivé de faire tout cela pour lui, le Fils de l'homme répondra: « En vérité, je vous le dis, dans la mesure où vous l'avez fait à l'un de ces plus petits de mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait ». Le jugement inverse tombera sur ceux qui se sont comportés autrement: « En vérité, je vous le dis, dans la mesure où vous ne l'avez pas fait à l'un de ces plus petits, à moi non plus vous ne l'avez pas fait ».On pourrait assurément allonger la liste des souffrances qui ont suscité l'émotion humaine, la compassion, la prise en charge, ou bien ne les ont point provoquées. La première et la seconde déclarations du Christ à propos du jugement dernier indiquent sans équivoque possible combien est essentiel, dans la perspective de la vie éternelle à laquelle tout homme est appelé, le fait de « s'arrêter », à l'exemple du bon Samaritain, près de la souffrance de son prochain, d'avoir pitié d'elle, et enfin de la soulager. Dans le programme messianique du Christ, qui est le programme du Royaume de Dieu, la souffrance est présente dans le monde pour libérer l'amour, pour faire naître des œuvres d'amour à l'égard du prochain, pour transformer toute la civilisation humaine en « civilisation de l'amour ». Dans cet amour, le sens salvifique de la souffrance se réalise à fond et atteint sa dimension définitive. Les paroles du Christ à propos du jugement dernier permettent de comprendre cela avec toute la simplicité et la clarté évangéliques.Ces paroles sur l'amour, sur les actions charitables liées à la souffrance humaine, nous permettent encore une fois de découvrir, à la base de toutes les souffrances humaines, la souffrance rédemptrice du Christ. Le Christ dit: « C'est à moi que vous l'avez fait ». Il est bien celui qui, en chacun, expérimente l'amour. C'est bien lui qui reçoit une aide, lorsque celle-ci est apportée à toute souffrance sans exception. C'est bien lui qui est présent dans telle ou telle personne qui souffre, puisque sa souffrance salvifique a été ouverte une fois pour toutes à toute souffrance humaine. Et tous ceux qui souffrent ont été appelés une fois pour toutes à devenir participants « des souffrances du Christ ». De même tous ont été appelés à « compléter » par leur propre souffrance « ce qui manque aux épreuves du Christ ». En même temps le Christ a enseigné à l'homme à faire du bien par la souffrance et à faire du bien à celui qui souffre. Sous ce double aspect, il a révélé le sens profond de la souffrance. | |
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