Chapitre 25 - Imitateurs du bon larron en Orient
Les sept voleurs de grands chemins, dans l'île de Chypre. - Convertis par deux disciples de saint Paul. - Prisonniers comme eux. - Devenus de glorieux martyrs. - Leurs noms. - La grande courtisane d'Antioche. - Son prestige. - Son luxe. - Histoire détaillée de sa conversion. - Son baptême. - Son vrai nom. - Sa pénitence. - Sa mort. - En Égypte, David le brigand et l'assassin. - Subitement converti. - Devenu un fervent solitaire et un Thaumaturge. - Un autre voleur de grands chemins. - Solidement converti. - Sainteté de sa vie. - Héroïsme de sa mort. - Conversion collective. - Encouragement au XIXè siècle. - Les Ninivites. - Ce qu'ils étaient. -
Étendue et magnificence de leur ville, reconnues par la récente découverte de ses ruines. Disons adieu à l'Europe et retournons vers les lieux où notre voyage a commencé. En passant, pénétrons dans les prisons de l'île de Chypre. Voyez au fond de ce cachot deux illustres disciples de saint Paul, Jason et Sosipater, prison- 55 niers de Jésus-Christ. Autour d'eux sont sept voleurs de grands chemins, que la maréchaussée romaine vient d'arrêter dans les montagnes. Voulez-vous connaître leurs noms ? Ils sont dignes d'être révélés ; car ils sont écrits, non plus dans les annales du crime, mais dans les fastes de la gloire. Ces hommes s'appellent : Faustinus, Jascicolus, Saturninus, Januarius, Marsulius, Euphrasius et Mammius. Imitateurs du bon Larron dans sa vie de brigandage, nous allons les voir devenir les imitateurs de sa conversion. Animés de l'esprit du Sauveur, le propre des saints est d'avoir pitié des pécheurs, et, on peut le dire, pitié en proportion de leur misère morale. Jason et Sosipater sont enchaînés, mais la parole de Dieu ne l'est pas. Ils l'adressent à leurs nouveaux compagnons. Elle est écoutée, comprise, aimée. Les nouveaux Dimas demandent le baptême, ils le reçoivent et bientôt ils meurent avec leurs Évangélistes, non comme voleurs, mais comme martyrs.
Chaque année, le 29 avril, l'Église consacre dans son Martyrologe ce nouveau triomphe de la miséricorde. Nous voici revenus à Antioche, capitale de la Syrie. Une conversion non moins miraculeuse nous y attend. Laissons à un témoin oculaire le soin d'en raconter les détails. «Plusieurs évêques étaient assemblés à Antioche pour une affaire importante ; de ce nombre était None, mon très saint évêque. C'était un homme admirable, qui avait vécu comme un parfait solitaire, dans le monastère de Tabenne. Comme les prélats étaient assis devant la porte du temple, ils prièrent None, mon saint pasteur, de leur faire quelque discours spirituel. «Il se rendait à leurs vœux, lorsque nous vîmes passer à cheval, devant nous, la plus fameuse de toutes les comédiennes d'Antioche, avec une si grande pompe et si richement parée, que ce n'était qu'or, perles et pierres précieuses ; car, ne se contentant pas que ses habillements en fussent enrichis, ses brodequins mêmes en étaient couverts.
Elle était accompagnée d'un très grand nombre de jeunes garçons et de jeunes filles magnifiquement vêtus, dont les uns marchaient devant elle, et dont les autres la suivaient. «Sa beauté était si grande, que les hommes du siècle ne pouvaient se lasser de la regarder ; et, bien qu'elle ne fit que passer, tout l'air fut rempli des excellentes odeurs dont elle était parfumée. Tous les évêques la voyant marcher avec un tel appareil, sans avoir seulement un voile sur la tête ni sur les épaules, qui étaient toutes nues, et avec une contenance si peu modeste, gémirent en leur cœur sans dire mot, et détournèrent leurs yeux d'elle comme d'un grand péché. «Mais le bienheureux évêque None la considéra longtemps. Puis, quand elle fut passée, se tournant vers les évêques, assis autour de lui, il leur dit : «N'avez-vous pas pris grand plaisir à voir l'extrême beauté de cette femme ?»
À quoi nul d'eux ne répondant, il mit la tète sur ses genoux et, tout trempé de larmes, il redit encore aux évêques : «N'avezvous pas pris un grand plaisir à voir l'extrême beauté de cette femme ?» Eux gardant le silence, il ajouta : «Et moi j'y ai pris un très grand plaisir, parce que Dieu la mettra un jour devant Son trône redoutable, pour s'en servir à nous juger. Car, combien croyez-vous, mes chers frères, qu'elle ait employé d'heures à se parer pour plaire au monde ?
Et nous, quel soin mettons-nous à purifier nos âmes et à les parer pour plaire à Dieu ?» «Ayant ainsi parlé il me prit par la main, et, étant arrivé à son logis où j'avais une cellule, il entra dans sa chambre, se prosterna contre terre et disait en se frappant la poitrine : Jésus-Christ, mon Seigneur et mon Maître, ayez pitié de moi, pauvre pécheur, qui n'ai pas en toute ma vie pris autant de soin de parer mon âme, que cette courtisane en a pris en un jour pour parer son corps». «Le lendemain, qui était un dimanche, tous les évêques assistèrent à la messe solennelle. Après l'Évangile, l'archevêque d'Antioche, prenant le livre de l'Evangile, le présenta au bienheureux None et le pria de vouloir instruire le peuple. Alors, prenant la parole, il fit un discours plein de cette sagesse divine qui était en lui et qui n'avait rien d'affecté, de subtil ni de superflu.
Par des paroles simples et sans force il représenta si vivement le Jugement dernier, que tous les auditeurs en furent extraordinairement touchés. «La Providence voulut que la courtisane dont j'ai parlé s'y trouvât présente. Elle n'avait jamais eu le moindre sentiment de ses péchés ; mais la crainte de Dieu fit une telle impression sur son cœur, qu'elle commença à pousser de grands soupirs, et à verser des ruisseaux de pleurs, sans qu'il fût en son pouvoir de les retenir. En s'en allant, elle dit à deux de ses gens : «Demeurez ici, et, lorsque le saint évêque None sortira de l'église, suivez-le pour apprendre où il demeure et venez me le dire». Ses gens nous suivirent jusqu'à notre logis. «La courtisane, le connaissant, envoya aussitôt par eux au saint évêque des tablettes dans lesquelles ces paroles étaient écrites : «Au saint disciple de Jésus-Christ, une pauvre pécheresse, disciple du démon.
J'ai appris que le Dieu que vous adorez est descendu du ciel sur la terre, non pour l'amour des justes, mais pour sauver les criminels. Ayant su par le rapport des chrétiens quelle est votre sainteté et le longtemps que vous servez un si bon Maître, je vous conjure de témoigner que vous êtes Son vrai disciple, en ne méprisant pas le désir extrême que j'ai de m'approcher de Lui». «Le saint évêque lui répondit que Dieu connaissait ses dispositions et que, si elles étaient sincères, elle pouvait venir le voir ; qu'il la recevrait en présence des autres évêques et non autrement. Cette lettre la combla d'une telle joie, qu'après l'avoir lue et relue, elle vint en toute hâte nous trouver à notre demeure. «Le bienheureux None assembla aussitôt les évêques et commanda qu'on la fît venir. Etant entrée, elle se jeta à ses pieds et lui dit en les embrassant : «Je vous conjure d'imiter Jésus-Christ, votre Maître, en me faisant ressentir les effets de votre bonté.
Rendez-moi chrétienne, car je suis un abîme de péchés et un gouffre de toutes sortes d'iniquités. Je vous demande le baptême. «Les saints canons, lui répondit le saint, défendent de baptiser une courtisane, à moins qu'elle ne présente des personnes respectables, qui répondent qu'elle ne retombera pas dans les mêmes péchés». A ces mots, elle embrassa plus fortement les pieds du saint, les arrosa de ses larmes, les essuya de ses cheveux. «Puis elle lui dit : «Si vous différez de me baptiser, quoique souillée de tant de péchés, je vous attribuerai tous ceux que je pourrai commettre à l'avenir, et vous rendrez compte à Dieu de mon âme. Si vous ne m'offrez aujourd'hui à Sa miséricorde, je souhaite que vous le renonciez et que vous adoriez les idoles». «Tous les évêques et les ecclésiastiques, entendant une si grande pécheresse parler de la sorte, demandèrent avec instance qu'on la baptisât.
Alors le saint évêque lui dit : «Comment vous appelez-vous ?» Elle répondit : «Mon nom véritable est Pélagie ; mais tous les habitants d'Antioche me nomment Perle, à cause de la grande quantité de perles et d'autres ornements dont je me suis trouvée enrichie par mes péchés ; car j'étais comme la boutique la plus parée et la plus magnifique qu'eût le démon». «Pélagie, ayant reçu le baptême, rentra chez elle, et envoya à mon saint évêque tout ce qu'elle avait d'habillements, d'argent, d'or et de pierreries, afin d'en disposer comme il l'entendrait. «Le huitième jour après son baptême, elle se leva secrètement la nuit, se revêtit d'un cilice et d'un méchant manteau, que le bienheureux évêque lui avait donné, quitta Antioche pour n'y jamais revenir, et alla s'enfermer dans une cellule, près de Jérusalem, sur la montagne des Oliviers, non loin du lieu où Notre-Seigneur avait fait sa prière.
Elle y resta environ quatre ans, complètement séparée du monde, et mourut enfin de la mort des prédestinés». Telle fut la conversion d'une femme dont le salut paraissait désespéré. Illustre entre toutes les pénitentes, sainte Pélagie, obtenez à celles qui auraient eu le malheur de vous imiter dans vos égarements, la grâce de devenir elles-mêmes des monuments de l'infinie miséricorde de Dieu. Pour un autre genre de pécheurs, adressons la même prière aux glorieux convertis, dont nous allons raconter l'histoire. Au VIè siècle vivait, non loin de la ville d'Hermopolis, en Égypte, un célèbre voleur nommé David. Épiant sans cesse les voyageurs, il dépouillait les uns, tuait les autres, et se souillait de tant d'autres crimes, que nul ne lui était comparable en cruauté. Un jour qu'il commettait un vol audacieux, à la tête de sa bande, composée de plus de trente brigands, il fut soudain touché d'un si grand repentir, qu'il abandonna ses compagnons et se dirigea vers le monastère le plus voisin. Ayant frappé à la porte, le portier lui demanda ce qu'il voulait. «Je veux être solitaire», répondit le voleur. Le portier alla prévenir l'abbé, qui descendit aussitôt. Voyant cet homme déjà avancé en âge, le vénérable abbé lui dit : «Vous ne sauriez demeurer ici ; nos austérités sont si grandes que vous ne pourrez les supporter. «Mon Père, répondit le voleur, recevez-moi seulement, je vous en conjure ; il n'y a rien que je ne fasse».
L'abbé continuant de le refuser, toujours pour la même raison : «Eh bien, reprit le voleur, je vous déclare, mon Père, je suis David, le chef des brigands, qui viens ici pour pleurer mes péchés ; et je vous proteste, par le Dieu qui habite dans le ciel, que, si vous refusez de me recevoir et que je retourne à ma première vie, vous répondrez devant Lui de tous les crimes que je commettrai». L'abbé, l'entendant parler de la sorte, le fit entrer, lui coupa les cheveux et lui donna l'habit de solitaire. Ce jeune et vieux soldat tout ensemble commença sur-le-champ à combattre avec tant de courage dans la milice spirituelle, qu'il surpassa bientôt les autres solitaires, quoiqu'ils fussent au nombre de soixante-dix. L'obéissance, l'humilité, l'abstinence du nouveau Dimas étaient pour tous un sujet continuel d'édification.
Un jour que David était assis dans sa cellule, un ange lui apparut et lui dit : «David, Dieu vous a remis tous vos péchés. - Le nombre de mes péchés, répond David, surpasse celui des grains de sable de la mer ; je puis ne croire que Dieu me les ait remis en si peu de temps». L'ange reprend : «Pour avoir refusé de croire qu'il aurait un fils, Zacharie fut privé de la parole ; vous-même en serez privé en punition de votre incrédulité». David, tombant la, face contre terre, lui dit : «Lorsque je passais ma vie à répandre le sang humain et à commettre tant d'autres crimes, j'avais le libre usage de la parole, et vous voudriez me l'ôter, maintenant que je désire servir Dieu et publier les louanges de Sa miséricorde ? «Quand il faudra chanter les louanges de Dieu, répond le céleste envoyé, vous aurez la parole libre. Hors de là, il ne sera pas en votre pouvoir de proférer un seul mot». Il en fut ainsi.
L'humble David continua de vivre saintement, opéra des miracles et mourut comme son glorieux modèle, le bienheureux Dimas. A ce trait qui, en nous révélant la rapidité et la plénitude de la miséricorde divine, est si propre à bannir les inquiétudes du cœur des pécheurs vraiment pénitents, s'en joint un autre, où l'héroïsme du repentir s'élève jusqu'au sublime. Un grand voleur, touché de la grâce, vint trouver l'abbé Zozime de Cilicie. Il le pria, au nom de Dieu, de le recevoir dans son monastère, afin de l'empêcher de commettre les assassinats et les autres crimes dont il s'était fait une longue habitude.
Après lui avoir adressé une grande exhortation, le bon vieillard le recul et lui donna le saint habit de solitaire. A quelque temps de là, il lui dit : «Croyez-moi, mon fils, ne demeurez pas plus longtemps parmi nous. Si la justice savait où vous êtes, elle vous ferait prendre. Mais venez avec moi, je vous conduirai dans le monastère de l'abbé Dorothée, qui est entre Gaza et Mayume». Sur quoi, le vénérable supérieur, le prenant par la main, le conduisit au monastère de l'abbé Dorothée. Il y resta neuf ans. Plein de ferveur, il édifia tous les religieux par la pratique constante de la règle. Il apprit tout le Psautier et toutes les autres choses qu'il fallait savoir dans la vie religieuse. A la fin de la neuvième année il vint retrouver l'abbé Zozime, et lui dit : «Mon Père, je vous prie de me permettre de quitter cet habit que vous m'avez donné, et de me rendre celui que j'avais lorsque je vins ici». Ces paroles ayant fort affligé le saint vieillard, il lui demande la cause d'un pareil changement, il répondit : «J'ai passé neuf ans en grand repos dans le monastère, où il vous a plu de me conduire, jeûnant autant que je l'ai pu, vivant dans la continence, dans l'obéissance et dans la crainte de Dieu : ce qui me donne lieu d'espérer que, par Sa miséricorde infinie, le Seigneur m'a remis beaucoup de péchés.
«Néanmoins, soit que je veille ou que je dorme, que je sois à l'église ou au réfectoire, soit même que j'aille communier, je vois partout, devant mes yeux, un jeune enfant que j'ai tué autrefois. Sans cesse il me dit : Pourquoi as-tu trempé tes mains dans mon sang ? et il ne me donne pas un seul moment de repos. C'est pourquoi, mon Père, je veux m'en aller, afin d'expier par ma mort un si grand crime, car je le tuai sans aucun sujet». Ensuite de ces paroles, il reprit ses habits et se dirigea vers Diospolis. Le jour même, il fut arrêté en chemin, et le lendemain il eut la tète tranchée. Les conversions que nous venons de citer et d'autres qu'on pourrait y joindre, sont des conversions individuelles, bonnes pour encourager tels ou tels pécheurs en particulier. Mais, afin de déterminer notre siècle lui-même à se convertir, il reste à lui montrer la conversion subite de tout un peuple. En lui prouvant que rien n'est impossible à la miséricorde de Dieu, un pareil exemple répondra à toutes les objections de son esprit et de son cœur.
Le découragement fera place à la confiance, la stupide indifférence au repentir ; et le grand enfant prodigue dira : Je me lèverai, et j'irai à mon Père. Mourir après avoir entendu cette parole, serait mourir de bonheur. Or dans l'antique Orient existait un empire, fameux par sa puissance, par ses richesses, par son luxe, par sa colossale idolâtrie et par tous les vices, qui sont la conséquence inévitable de sensualisme et du culte des démons. La capitale de cet empire, surtout, se distinguait par le débordement de ses millions d'habitants. Il est d'expérience que les grands centres de population furent toujours, et sont encore des foyers de corruption physique et morale. Quelle devait être la démoralisation de la ville dont nous voulons parler ? Dans l'enceinte de ses murs, hauts de 100 pieds, assez larges pour permettre à trois chars de front de courir dessus, et flanqués de quinze cents tours, hautes de 200 pieds, Ninive renfermait toute la population d'un royaume.
Trois journées de marche suffisaient à peine pour la traverser1 . Au milieu du tumulte de cette grande ville, enivrée de voluptés et souillée d'abominations, dont le cri vengeur est monté jusqu'au ciel, retentit tout à coup la voix d'un homme inconnu. Cet homme est un prophète, et sa voix disait : «Encore quarante jours et Ninive sera détruite». A cette menace, confirmée par des miracles, le roi, le premier, rentre en lui-même. Il descend de son trône et s'humilie, tout son peuple l'imite. La dissipée, l'orgueilleuse, la splendide, la voluptueuse Ninive se couvre de cendres et de cilice. Elle jeûne, elle prie, elle pleure, elle se repent elle est sauvée. L'exemple de Ninive est un enseignement immortel, laissé aux nations coupables. S'il leur montre avec quelle extrême facilité Dieu leur ouvre Ses bras paternels, il leur indique aussi l'unique moyen d'obtenir miséricorde.
Pour les peuples comme pour les individus, le repentir est la première loi du pardon. Au lieu de s'obstiner dans la révolte, et de courir follement à la recherche de moyens impossibles pour sortir de l'impasse où il s'est jeté, que le Dix-neuvième Siècle tourne donc ses regards vers Ninive et vers le bon Larron, deux grands coupables, si promptement convertis et si heureux de leur conversion ! A l'exemple du roi de Ninive, que les rois de l'Europe rentrent en eux-mêmes et déplorent leurs iniquités ; que les peuples imitent les rois ; que de toutes les poitrines s'élève ce cri sauveur : «Nous avons fait fausse route ! Ergo erravimus !» et toutes les questions sociales sont à l'instant résolues. La société ébranlée se rassoit sur ses bases, la Révolution est vaincue ; et, autant que le permettent les conditions de la vie présente, la paix est descendue sur la terre.
Se repentir ou périr : telle est l'alternative à laquelle le Dix-neuvième Siècle ne peut plus échapper. Au lieu de choisir la mort, pourquoi ne choisirait-il pas la vie ? Ni le nombre ni l'énormité de ses fautes ne doivent l'effrayer. «Quand on voit, dit un Père de l'Église, les portes du ciel s'ouvrir à deux battants devant un voleur de grands chemins, qui pourrait désespérer ?» «Prends donc courage et sache vouloir, lui dirons-nous, avec la Bouche d'or de l'Orient. Le mal n'est pas de l'essence de ta nature : doué du libre arbitre, tu peux le vaincre. Sans doute, tes iniquités sont grandes. Tu es un siècle d'argent : tu peux devenir un évangéliste. Tu es un siècle de blasphèmes : tu peux devenir un apôtre. Tu es un siècle de vols et de rapines : tu peux voler le ciel. Tu es un siècle de pratiques démoniaques : tu peux adorer le vrai Dieu. Pas de chaînes qui ne soient rompues, pas de crimes qui ne soient effacés par la pénitence. En mourant, le Rédempteur du monde a choisi, pour le convertir, tout ce qu'il y a de plus coupable, afin de ne laisser, jusqu'à la fin des siècles, aucun subterfuge au découragement. C'est ainsi qu'il t'a fait ses adieux».