La relation fondamentale du prêtre est celle qui l'unit à Jésus Christ Tête et Pasteur: il participe en effet, d'une manière spécifique et authentique, à la « consécration », ou « onction », et à la « mission » du Christ ( Lc 4, 18-20). Mais à cette relation-là est intimement liée celle qui l'unit à l'Église. Il ne s'agit pas de « relations » simplement juxtaposées : elles sont elles-mêmes intimement unies par une sorte d'immanence réciproque. La référence à l'Église est inscrite dans l'unique et même rapport du prêtre au Christ, en ce sens que c'est la "représentation sacramentelle" du Christ par le prêtre qui fonde et anime son rapport à l'Église.
En ce sens, les Pères synodaux ont écrit: « En tant qu'il représente le Christ Tête, Pasteur et Époux de l'Église, le prêtre est placé non seulement dans l'Église, mais aussi face à l'Église. Le sacerdoce, en même temps que la Parole de Dieu et les signes sacramentels dont il est le serviteur, appartient aux éléments constitutifs de l'Église. Le ministère du prêtre est entièrement au service de l'Église pour promouvoir l'exercice du sacerdoce commun de tout le peuple de Dieu ; il est ordonné non seulement à l'Église particulière, mais encore à l'Église universelle (Presbyterorum ordinis numéro 10 ), en communion avec l'évêque, avec Pierre et sous l'autorité de Pierre. Par le sacerdoce de l'évêque, le sacerdoce du second ordre est incorporé à la structure apostolique de l'Église. Ainsi le prêtre, comme les Apôtres, remplit la fonction d'ambassadeur du Christ (2 Co 5, 20). C'est là que se fonde le caractère missionnaire du sacerdoce » . (28)Le ministère ordonné naît ainsi avec l'Église ; qu'il s'agisse de celui des évêques ou, en référence et en communion avec eux, de celui des prêtres, il a un lien particulier avec le ministère des Apôtres à l'origine, dont il prend réellement la succession, même si, par rapport à celui-ci, il présente des modalités existentielles différentes. On ne doit donc pas considérer le sacerdoce ordonné comme s'il était antérieur à l'Église : il est entièrement au service de l'Église elle-même ; mais il ne doit pas non plus être envisagé comme postérieur à la communauté ecclésiale, comme si celle-ci pouvait être comprise comme étant déjà constituée sans ce sacerdoce.La relation du prêtre avec Jésus Christ et, en lui, avec son Église s'inscrit dans l'être même du prêtre, en vertu de sa consécration ou de l'onction sacramentelle, et dans son agir, c'est-à-dire dans sa mission ou dans son ministère. En particulier, « le prêtre ministre est serviteur du Christ présent dans l'Église mystère, communion et mission. Du fait qu'il participe à l'"onction" et à la "mission" du Christ, il peut prolonger dans l'Église sa prière, sa parole, son sacrifice, son action salvifique. Il est donc serviteur de l'Église mystère parce qu'il accomplit les signes ecclésiaux et sacramentels de la présence du Christ ressuscité. Il est serviteur de l'Église communion parce que - en unité avec l'évêque et en lien étroit avec le presbyterium - il construit l'unité de la communauté ecclésiale dans l'harmonie des diverses vocations, des charismes et des services. Il est, enfin, serviteur de l'Église mission parce qu'il fait de la communauté une communauté annonciatrice et témoin de l'Évangile. »
Ainsi dans son être même et dans sa mission sacramentelle, le prêtre apparaît, dans la structure de l'Église, comme signe de la priorité absolue et de la gratuité de la grâce, qui est donnée à l'Église par le Christ ressuscité. Par le sacerdoce ministériel, l'Église prend conscience, dans la foi, de ne pas exister par elle-même, mais par la grâce du Christ dans l'Esprit Saint. Les Apôtres et leurs successeurs, comme détenteurs d'une autorité qui leur vient du Christ Tête et Pasteur, sont placés - par leur ministère - face à l'Église, comme prolongement visible et signe sacramentel du Christ, à sa propre place en face de l'Église et du monde, comme origine permanente et toujours nouvelle du salut, « lui le sauveur du Corps » (Ep 5, 23).
Le ministère ordonné, de par sa nature même, ne peut être accompli que pour autant que le prêtre est uni au Christ par l'insertion sacramentelle dans l'ordre presbytéral et donc pour autant qu'il est en communion hiérarchique avec son évêque. Le ministère ordonné est radicalement de « nature communautaire » et ne peut être rempli que comme « œuvre collective » . Le Concile s'est longuement exprimé sur cette nature communionnelle du sacerdoce, en examinant successivement les relations du prêtre avec son évêque, avec les autres prêtres et avec les laïcs. Le ministère des prêtres est avant tout communion et collaboration responsable et nécessaire au ministère de l'évêque, dans sa sollicitude pour l'Église universelle et pour l'Église particulière, au service de laquelle ils constituent avec l'évêque un unique presbyterium.
Chaque prêtre, qu'il soit diocésain ou religieux, est uni aux autres membres du presbyterium, en fonction du sacrement de l'Ordre, par des liens particuliers de charité apostolique, de ministère et de fraternité. Tous les prêtres, en effet, diocésains ou religieux, participent à l'unique sacerdoce du Christ Tête et Pasteur, « visent le même but: construire le Corps du Christ ; de notre temps surtout, cette tâche réclame des fonctions multiples et des adaptations nouvelles », et le ministère s'enrichit au cours des siècles de charismes toujours nouveaux.
Les prêtres, enfin, parce que leur figure et leur engagement dans l'Église ne remplacent pas, mais bien plutôt promeuvent le sacerdoce baptismal de tout le peuple de Dieu, le conduisant à sa pleine réalisation ecclésiale, se trouvent en relation positive et constructive avec les laïcs. Ils sont au service de leur foi, de leur espérance et de leur charité. Ils en reconnaissent et soutiennent, comme frères et amis, la dignité de fils de Dieu et ils les aident à exercer pleinement leur rôle spécifique dans le cadre de la mission de l'Église.
Le sacerdoce ministériel conféré par le sacrement de l'ordre et le sacerdoce commun ou « royal » des fidèles, qui ont entre eux une différence essentielle et non seulement de degrés), sont ordonnés l'un à l'autre; ils dérivent l'un et l'autre - sous des formes différentes - de l'unique sacerdoce du Christ. Le sacerdoce ministériel, en effet, ne signifie pas en soi un degré plus élevé de sainteté par rapport au sacerdoce commun des fidèles; mais, par le sacerdoce ministériel, les prêtres ont reçu du Christ, par l'Esprit, un don spécifique, afin de pouvoir aider le peuple de Dieu à exercer fidèlement et pleinement le sacerdoce commun qui lui est conféré.
Comme le Concile le souligne, « le don spirituel que les prêtres ont reçu à l'ordination les prépare non pas à une mission limitée et restreinte, mais à une mission de salut d'ampleur universelle "jusqu'aux extrémités de la terre" ; n'importe quel ministère sacerdotal participe, en effet, aux dimensions universelles de la mission confiée par le Christ aux Apôtres ». En vertu de la nature même de leur ministère, ils doivent donc être pénétrés et animés d'un profond esprit missionnaire et « de cet esprit vraiment catholique qui les habituera à dépasser les limites de leur propre diocèse, de leur nation et de leur rite, pour subvenir aux besoins de l'Église entière, prêts au fond du cœur à prêcher l'Évangile jusqu'aux extrémités de la terre ».
En outre, en particulier parce que le prêtre est, à l'intérieur de l'Église, homme de la communion, il doit être, à l'égard de tous les hommes, homme de la mission et du dialogue. Profondément enraciné dans la vérité et dans la charité du Christ, et animé du désir et de la nécessité intérieure d'annoncer à tous le salut, il est appelé à nouer avec tous les hommes des rapports de fraternité et de service, dans une recherche commune de la vérité, en travaillant à promouvoir la justice et la paix. Il doit nouer ces rapports fraternels en premier lieu avec les frères des autres Églises et des confessions chrétiennes, mais aussi avec les fidèles des autres religions, avec les hommes de bonne volonté, et, d'une manière spéciale, avec les pauvres et avec les plus faibles, ainsi qu'avec tous ceux qui aspirent, sans le savoir ou sans l'exprimer, à la vérité et au salut apporté par le Christ, selon la parole et l'exemple de Jésus qui a dit : « Ce ne sont pas les gens en bonne santé qui ont besoin du médecin, mais les malades ;... je ne suis pas venu appeler les justes, mais les pécheurs » (Mc 2, 17).
Aujourd'hui, en particulier, la tâche pastorale prioritaire de la nouvelle évangélisation incombe à tout le peuple de Dieu, et demande une nouvelle ardeur, de nouvelles méthodes et un nouveau langage pour l'annonce et le témoignage évangéliques. Il exige que les prêtres soient radicalement et totalement plongés dans le mystère du Christ et capables de réaliser un nouveau style de vie pastorale, caractérisé par une profonde communion avec le Pape, les évêques et entre eux, et par une collaboration féconde avec les laïcs, dans le respect et la promotion des divers rôles, des charismes et des ministères au sein de la communauté ecclésiale.
« Aujourd'hui, cette Écriture est accomplie pour vous qui l'entendez » (Lc 4, 21). Écoutons encore une fois ces paroles de Jésus à la lumière du sacerdoce ministériel dont nous avons présenté la nature et la mission. L'« aujourd'hui » dont parle Jésus, parce qu'il appartient à la « plénitude des temps » et la définit - temps du salut accompli et définitif -, désigne le temps de l'Église. La consécration et la mission du Christ exprimées par ces paroles : « L'Esprit du Seigneur... m'a consacré par l'onction, pour porter aux pauvres la Bonne Nouvelle » sont la racine vivante d'où germe la consécration et la mission de l'Église, « plénitude » du Christ (Ep 1, 23) ; avec la régénération baptismale, tous les chrétiens ont reçu l'effusion de l'Esprit du Seigneur, qui les consacre pour former un temple spirituel et un sacerdoce saint. L'Esprit les envoie proclamer les merveilles accomplies par Celui qui les a appelés des ténèbres à son admirable lumière (1 P 2, 4-10).
Le prêtre participe à la consécration et à la mission du Christ de manière spécifique et authentique, c'est-à-dire par le sacrement de l'Ordre, qui l'a configuré, dans son être même, à Jésus Christ, Tête et Pasteur ; il participe à la mission d'« annoncer aux pauvres la Bonne Nouvelle » au nom et en la personne du Christ.Dans leur message final, les Pères synodaux ont condensé en une formule brève, mais riche de sens, la « vérité », ou mieux le « mystère » et le « don » du sacerdoce ministériel, en disant : « Notre identité a sa source ultime dans l'amour du Père. Au Fils qu'il a envoyé, Souverain Prêtre et Bon Pasteur, nous sommes unis sacramentellement par le sacerdoce ministériel dans la puissance de l'Esprit Saint. La vie et le ministère du prêtre sont la continuation de la vie et de l'action du Christ lui-même. Là réside notre identité, notre vraie dignité, notre source de joie, et notre certitude de vie ».